Le Phare 3.03 – Je ne solliciterai pas un 4e mandat à la présidence du SEECoV

C’est ma 39e session au Collège de Valleyfield. Ma 20e session d’hiver.

Depuis 10 ans, ma contribution a surtout été d’enseigner la langue et la littérature, mais aussi d’occuper des fonctions de représentation dans diverses instances du collège : coordination départementale et de programme, commission des études, conseil d’administration, comité exécutif du collège, instances syndicales locales et nationales, comité de direction du syndicat, sans parler du bénévolat pour les activités étudiantes et de tant de comités sur tant de dossiers qui ont animé, au fil du temps, la communauté collégiale. Notre milieu de travail, remarquablement démocratique, s’enrichit de toutes ces occasions d’échanges, de débats et de prises de décisions collectives.

Ces trois dernières années, à la présidence du SEECoV, j’ai articulé ma contribution autour du projet de représenter des enseignants-es salariées de 18 départements, de les regrouper, de coordonner leur action collective pour que soit mieux reconnue et mieux défendue la valeur de leur travail. Je l’ai fait avec intensité. Je suis satisfait du travail que j’ai accompli en collégialité avec tant d’entre vous au service de notre communauté. Un syndicat est fort quand ses membres sont unis et agissent de façon concertée.

Or, je ressens une certaine fatigue, probablement accumulée au fil du temps. Peut-être est-ce les premiers symptômes de l’épuisement professionnel. Certaines zones de mon jardin sont en friche et ont besoin de mes soins. Dans ces circonstances, la sagesse et l’intérêt des membres m’incitent à ne pas solliciter un 4e mandat à la présidence du SEECoV. J’éprouve le besoin d’aller renouveler mon inspiration et mon énergie en recentrant mon travail autour de mes fonctions d’enseignement et dans un projet d’études. Merci à vous qui m’avez témoigné votre confiance, qui avez fait équipe avec moi au comité de direction ou dans les autres instances du collège. J’espère que ma passion et mon engagement auront pu en inspirer d’autres !

Les membres et le syndicat pourront évidemment toujours compter sur mon expérience et mon implication, car je suis convaincu que la vie syndicale, inhérente à notre profession, est l’affaire du groupe et non de quelques-uns-es. Surtout, les élus-es du SEECoV ne peuvent agir sans le soutien et l’implication concrète de la majorité des membres. Je compte poursuivre le travail dans certains dossiers, notamment celui de la nécessaire rénovation de nos statuts et règlements.

Résultats de la consultation sur la possibilité de déplacer la plage horaire du mercredi

Comme vous le savez, une consultation au sein des professeurs(es) a récemment été tenue afin de connaitre la proportion des enseignants(es) qui seraient en faveur du déplacement de la plage horaire du mercredi après-midi. Vous recevrez plus d’informations sur les résultats obtenus à la prochaine assemblée générale du syndicat. Toutefois, nous tenons à vous informer dès maintenant que 58,5% des professeurs(es) ont affirmé ne pas souhaiter que la plage horaire du mercredi soit déplacée. Nous ne prévoyons donc pas entamer de discussions avec l’organisation scolaire à ce sujet.

Par ailleurs, vous avez été très nombreux à participer à cette consultation (95 professeurs(es) y ont répondu) et nous vous en remercions. De plus, les commentaires reçus nous portent à croire que les professeurs(es) apprécient ce mode de consultation dans la mesure où il est simple et rapide d’y répondre. Ainsi, il se peut que vous receviez d’autres petits sondages du même genre dans l’avenir.

Déplacement de l’assemblée générale d’élections

L’assemblée générale d’élections annoncée pour le 29 mars est déplacée au mercredi 4 avril à 16h pour ne pas interférer avec la fête de la reconnaissance. Soyez-y en grand nombre ! En plus d’y élire le prochain comité de direction du syndicat, les membres pourront y discuter de la modification du quorum requis pour la tenue de nos assemblées générales. Un avis de motion sur ce sujet a été présenté lors de l’assemblée du 13 février.

Et si la PIEA disparaissait ?

Le CCI se réunira ce mercredi 14 mars pour que les délégués-es des départements puissent échanger sur les modifications à la PIEA proposées par un comité de la commission des études. En attendant, et pour alimenter vos réflexions en département, voici un éclairage syndical sur la question.

Et si la PIEA disparaissait ?

Il ne se passerait presque rien.

Les départements qui ne l’auraient pas déjà fait pourraient vérifier que leurs modes et pratiques d’évaluation sont transparents, justes et cohérents, comme il se doit. C’est sans doute parce que les bonnes pratiques d’évaluation que propose la PIEA sont désormais bien implantées et intégrées dans les départements.

Or, un mythe entretenu par la direction et certains départements laisse croire que si elle n’était pas là, on assisterait aux pires dérives, aux pires abus en matière d’évaluation. La direction des études prétend même ouvertement que la PIEA assure son emprise sur les départements ou les profs délinquants-es. Typiquement, la direction exerce ce pouvoir en soumettant ces derniers à des enquêtes menant à des mesures disciplinaires (lettres au dossier, suspension, congédiement) ou administratives (reddition de comptes, évaluations diverses, congédiement administratif). Elle prétend même que de nombreuses coordinations départementales soutiennent cette approche autoritariste. Est-ce si vrai ? Chose certaine, nous sommes ici bien loin d’une approche collégiale ! Nous sommes bel et bien dans une lutte de pouvoir.

Cette lutte de pouvoir culminera à une CE du mois de mars alors que les membres de la CE seront appelés-es à adopter une PIEA révisée, modifiée. Les profs, majoritaires à la CE, devront décider entre une PIEA collégiale ou une PIEA autoritariste qui réaffirme l’emprise patronale sur les départements pour limiter leur autonomie en matière d’évaluation.

Pour mieux comprendre de quoi il retourne, un bref historique :

  • Avant 2005 : les enseignants-es et les départements évaluaient sans PIEA. Comme chacun sait, c’était le Far West, le Moyen-Âge, que dis-je ? la Grande noirceur de l’évaluation ! L’injustice et l’arbitraire prévalaient dans ce chaos pédagogique. Sans blague, les départements assumaient en collégialité avec la direction leurs responsabilités en matière d’évaluation.

 

  • Vers 2005 : dans la Loi sur les collèges, l’article 24 du RREC (Règlement sur le régime des études collégiales) : oblige désormais les CE des collèges à adopter une PIEA (Politique institutionnelle d’évaluation des apprentissages). La convention collective 2005-2010, imposée sous la menace d’un décret, inclut pour la première fois une référence à la PIEA. C’est une brèche dans l’autonomie des départements. L’alinéa 10 de l’article 4-1.05 est donc ajouté à la convention collective. Cet article précise que les départements ont la fonction de « […] définir les objectifs, appliquer les méthodes pédagogiques et établir les modes d’évaluation propres à chacun des cours dont le département est responsable en tenant compte de la Politique institutionnelle d’évaluation des apprentissages ; […] » (nous soulignons). Même si depuis toujours, « tenir compte » signifie « prendre en considération », « considérer à la lumière de », la direction du collège estime depuis que cela signifie « respecter », « se conformer à ».

 

  • 2009 : À la suite d’une consultation, la commission des études, dont les membres enseignant sont coordonnateurs-trices des programmes, adopte la PIEA. Celle-ci devra baliser les pratiques des départements en matière d’évaluation.

 

  • Automne 2014 : Le Syndicat constate que la direction fait la promotion de la PIEA comme d’un règlement qu’il faut respecter sous peine de sanctions disciplinaires, plutôt que comme une politique dont il faut tenir compte. La direction enclenche une enquête disciplinaire à l’encontre d’un enseignant qui n’avait pas publié ses notes à la 8e semaine dans Léa, ce que l’enseignant et son département ont pu expliquer de façon satisfaisante. Une lettre au dossier est tout de même émise ; un grief est déposé pour protéger l’autonomie en matière d’évaluation et pour contester l’utilisation de la PIEA pour intimider des enseignants et justifier des mesures disciplinaires, coercitives, contraires au principe de collégialité.

 

  • Décembre 2104 et mai 2015 : Un numéro spécial du Réverbère consacré à l’autonomie professionnelle est publié par le SEECoV. Je publie des textes dans ce Réverbère pour dénoncer la manœuvre et soulever les enjeux de l’autonomie professionnelle. La PIEA est dans l’angle mort syndical. Tout indique que la direction des études, soutenue par ses professionnels, cherche à renforcer sa mainmise sur les départements en ce qui concerne l’évaluation des apprentissages.

 

  • Automne 2015 : Un comité de la CE constitué uniquement de profs, c’est-à-dire boycotté par la DE, est créé pour réfléchir à des modifications, rapport déposé en mai 2016. Ce rapport recommande toutes sortes de modifications qui clarifient le sens des articles, mais surtout propose de modifier les articles 6.2.6, 6.3.3, 6.3.4, 6.5.2, 6.6.2 et 12.1.1 de la PIEA de façon à ce qu’ils incluent l’expression « tenir compte » plutôt que « respecter » ou autres vocables aux connotations autoritaires. Ces recommandations visent 3 objectifs :

1) faire en sorte que le texte de la PIEA ne puisse plus servir de caution à des mesures disciplinaires exercées abusivement par la direction du collège contre les profs ;

2) assurer un équilibre entre les préoccupations des profs, celles de la direction et celle des étudiants-es ;

3) faire en sorte que le texte de la PIEA soit conforme au ton et l’esprit de notre contrat de travail, qui protège l’autonomie des départements et des profs en matière d’évaluation.

  • Depuis l’automne 2016, à la suite de pressions de certains profs membres de la CE, un comité de la CE sur la révision de la PIEA est créé dans lequel les profs sont minoritaires. On y retrouve 6 cadres, 2 conseillers pédagogiques et 3 profs. Sans surprise, le comité écarte systématiquement toutes les recommandations du rapport proposant d’intégrer l’expression « tenir compte ». Les figures patronales ont prétexté que ce serait un flou propice au free for all et au chaos évaluatif. Pour rassurer tout le monde et faire prévaloir le bon sens collégial, j’ai même proposé une définition précise de l’expression :  

 

« Dans cette PIEA, l’expression tenir compte signifie prendre en considération les articles de la PIEA de façon à pouvoir justifier sur la base de faits contextuels, légaux ou pédagogiques, une application souple la PIEA par les enseignants et les assemblées départementales tout en préservant les principes d’équité, de justice, de cohérence de même que l’autonomie professionnelle et disciplinaire des enseignants-es et des assemblées départementales. »

Même refus. Je propose alors une nouvelle définition qui s’articule autour de l’expression « se référer à » plutôt que « tenir compte ». Cette nouvelle définition est d’ailleurs bien accueillie par les représentants de l’AGÉÉCoV :

« Dans cette PIEA, remplacer l’expression “respecter” par “se référer à”. “Se référer à” signifie : respecter les articles de la PIEA dans la mesure où, tout dépendant du contexte, leur application stricte ne va pas à l’encontre de motifs pédagogiques, c’est-à-dire des motifs basés sur des considérations pour favoriser l’apprentissage de l’étudiant. Cette modification pourrait faire en sorte que l’enseignant profite d’une certaine souplesse dans l’application de la PIEA. Les principes fondamentaux sont et demeurent ici ceux d’équité, de justice, de cohérence et d’autonomie professionnelle. Le professeur, secondé par l’assemblée départementale, est garant du respect de ces principes. »

Cette nouvelle proposition n’est pas soumise au comité. Le directeur des études affirme ne pas souhaiter explorer davantage cette voie.

Il y a aussi l’article 6.1.3 dont la modification ne fait pas consensus au comité. Il stipule présentement que les résultats des évaluations sommatives doivent être transmis dans un « délai raisonnable ». La modification litigieuse consiste à remplacer « délai raisonnable » par « délai maximal de 15 jours ouvrables, ou l’équivalent dans le cas d’une organisation pédagogique particulière, comme lors d’un cours intensif, et tout au long de la session. » Encore une fois on constate que la modification s’oriente vers un caractère plus rigide et plus autoritaire. Plusieurs départements ont déjà des normes qui précisent ce que sont les « délais raisonnables ». Ne peut-on faire confiance aux départements pour appliquer cette clause avec bon sens plutôt que de leur imposer des carcans encore plus contraignants ?

  • Février 2018 : Le directeur des études décide de suspendre momentanément les activités du comité pour procéder à une consultation des départements sur les modifications qui ne font pas consensus. C’est alors qu’il en profite pour proposer un ajout, l’article 6.6.7, qui stipulerait que la direction des études pourrait, « Dans le cadre de circonstances exceptionnelles, permettre des accommodements dans l’application de la politique. »

Dans les faits, cet article correspondrait au statuquo, car ce pouvoir discrétionnaire de la direction est déjà en application. Le flou que la DE dénonce dans l’expression « tenir compte » ne semble pas la déranger dans l’expression « circonstances exceptionnelles ».

Résumons-nous : la consultation porte sur l’ajout de l’article 6.6.7, sur les deux définitions susmentionnées permettant de remplacer le mot « respecter » par « tenir compte » ou « se référer à » dans les articles 6.2.6, 6.3.3, 6.3.4, 6.5.2, 6.6.2 et 12.1.1, et sur la modification de l’article 6.1.3 sur les délais d’évaluation.

  • Mars 2018 : les membres de la CE seront appelés à adopter une PIEA modifiée. Les profs membres de la CE seront devant un choix clair : une PIEA collégiale, respectueuse de l’autonomie professionnelle conventionnée ou une PIEA autoritariste confirmant l’érosion de l’autonomie professionnelle au profit d’un pouvoir patronal autoritaire et anticollégial sur les départements. Les profs membres de la CE saisiront-ils-elles une occasion historique de défendre leur autonomie et celle des futures générations d’enseignants au collège ? N’est-il pas temps de s’unir autour de cet enjeu crucial ?